Introduction

La Venue du Règne de Dieu

Avec Jésus, un monde vieux et usé, sans la présence active de l'Esprit (muet depuis la disparition des derniers prophètes écrivains, Aggée, Malachie, Zacharie) est en voie de mourir.

Un monde nouveau, celui de l'intervention en personne de Dieu, dans la puissance de l'Esprit, commence. Le Règne de Dieu est là.

C'est la "basileia", terme utilisé par Jésus pour désigner le royaume de Dieu/des cieux, thème central de toute son action, idée-force par laquelle les synoptiques résument son message et sa prédication.

Ce terme, peu courant en Palestine au 1er siècle, peut recouvrir quatre significations:

  1. il peut désigner le "pouvoir royal", au sens abstrait de domination, de souveraineté, d'exercice de la royauté,
  2. il peut aussi désigner le "royaume" au sens passif:
  3. .- domaine sur lequel s'exercent ce pouvoir et cette souveraineté,
    .- territoire ou portion d'espace au sens de royaume temporel,
    .- ordre qui résulte dans la création du fait que "Dieu règne",
  4. il peut désigner le "règne" au sens actif et dynamique d'exercice du pouvoir, c'est-à-dire le pouvoir de gouverner, l'autorité et la puissance d'un souverain, l'exercice pratique, quotidien et concret du pouvoir, l'agir et le gouvernement de Dieu: bref, le fait que Dieu règne actuellement dans le monde,
  5. il peut enfin désigner le but universel de ce règne, à savoir l'ensemble des biens salvifiques indescriptiblers que Dieu destine aux élus, à ceux qui, n'ayant aucun droit d'après els critères reçus dans la judaisme de l'époque, en étaient en fait lespremiers bénéficiaires.

Dans le Premier Testament, le terme "règne" ("malkut") ne désigne que très rarement un territoire ou une portion d'espace royal. Il n'avait jamais, en outre, le sens abstrait de "domination", de "souveraineté", mais il désignait presque toujours "le pouvoir", le "gouvernement divin" inauguré lors de la libération d'Egypte (Ex 15:18).

Pour Jésus, le "gouvernement" divin est une nouveauté radicale. Il ne s'agit plus de la gestion habituelle des affaires du peuple d'Israël, mais d'une ère nouvelle qui commence, celle de la "régénération de l'univers" (Mt 19:28).

Voici que commence la dernière étape de l'histoire du monde, qui doit aboutir à l'accomplissement définitif de l'univers. Dieu reprend l'orientation des choses. Il est, Lui, la révélation ultime et c'est l'Esprit qui va opérer cette œuvre, en paroles et en actes (Lc 24:19); Mc 1:27; 1 Thes 1:5). Le Christ, porteur de l'Esprit, après avoir été annoncé par Jean le Baptiste - le prophète qui lui a préparé la voie, l'Elie promis (Mal 3:23; Mt 11:14) - est le messager définitif de Dieu qui, en lui et par lui, prononce sa dernière Parole, dans des œuvres puissantes et dans une annonce pleine d'autorité (Mt 11:5s).

La Basileia, c'est la puissance agissante de Dieu dans le monde, par Jésus, sous l'impulsion de l'Esprit. C'est la manifestation achevée de Dieu, dans l'éclat de sa puissance et de sa gloire. Regnum Dei Deus est.

Donc, "dès maintenant", un nouveau peuple de Dieu est en marche:

  1. images utilisées par Jésus pour désigner le peuple nouveau: la famille (eschatologique) dont Dieu est le Père (Mt 23:9); ceux qui pratiquent la Parole sont ma mère, mes frères (Mt 12:46-50); - le troupeau rassemblé (Jn 10:1-29); - la ville sainte qui, du haut de Sion, doit éclairer les nations (Mt 4:16).
  2. images utilisées par Jésus pour décrire l'ère nouvelle: l'heure de la moisson a sonné (Jn 4:35); le figuier éclate en bourgeons (Mc 13:28); le vin nouveau (Jn 2:22); le pain de vie est offert aux enfants (Mc 7:24s); les disciples sont la lumière du monde (Mt 5:14).
  3. le royaume/règne de Dieu est "dès maintenant" parmi vous:

1. ses destinataires: ce sont tous ceux que le prophète Esaïe a mentionnés en Es 61:1: "les anawim", c'est-à-dire les courbés, ceux qui plient l'échine devant tous les pouvoirs et oppressions spirituelles ou sociales qui les accablent.
Pour Jésus, ce sont tous ceux qui ploient sous le fardeau de l'injustice (
comparer Mt 5:3 et Lc 6:20s): les pécheurs-types que sont les publicains et les prostituées (Mt 21:31), les violent usurpateurs du Royaume (Mt 11:22), la racaille qui ignore la loi, les déclassés, les marginaux sociaux, les exclus.

2. les signes de cette venue des temps nouveaux et derniers: la clarté retrouvée pour les aveugles, l'audition pour les soursds, la jubilation pour les muets, la motilité pour les paralysés: c'est le temps de la rédemption
(Lc 7:22)

3. l'expérience du royaume:
- le pardon ou la remise de dettes
(Mt 18:23-35; Lc 7:41-43; Lc 15:11-32).
- la communauté de table avec les pécheurs (2 R 25:27-30; Mc 2:15; Lc 15:2): prémices du festin de salut des derniers temps (Mt 8:11).

  1. les répercussions éthiques de la venue du Règne:
  1. le temps est court, convertissez-vous, corrigez la vision. Il faut bifurquer, retrouver une vie orientée vers l'avenir et changer les manières de penser, d'aimer, de réagir. Il faut renaître à nouveau et entrer dans le projet de Jésus (Lc 15; 19:8; Mc 10:17-31; Mt 22:11-13). M
  2. Croyez à l'Evangile (Mc 1:15): Jésus est la "grande nouvelle"; son existence inaugure une nouvelle et définitive avancée de l'aventure humaine. Par cette existence, une mutation s'accomplit dans le temps. Le salut, qui ouvre à chacun un nouvel espace de liberté, est proposé à tous.

Conclusion: l'annonce de la "grande nouvelle" suscita une tempête de protestations dans les milieux pharisiens. Il y eut une hiérarchie graduelle dans leur refus:

- incompréhension (Lc 15:29); - révolte (Lc 15:2; 19:7; Mt 20:11); - injures (Mt 11:19; Lc 7:34); -accusation de blasphème (Mc 2:7); - sommation aux disciples de se séparer de ce séducteur (Mc 2:16).

Mais elle a en même temps suscité, depuis deux mille ans, des milliers de disciples et de témoins qui, vaille que vaille, ont marché sur les pas de Jésus, changé de vie pour transformer la vie, attesté que l'Evangile valait la peine d'être vécu, accueilli le Règne de Dieu et donné espoir à tous ceux que la vie avait meurtris.

vertigineux


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