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PARDONNER, c’est RENDRE LIBRE (Mt 18 :
23-35) camille paul cartucci, bibliste, Metz
Dans
les 8(ou 9) paraboles qui sont propres à Matthieu (perle, filet, les 10 jeunes
filles, l’ivraie, le trésor caché, les ouvriers de la 11ème
heure, les deux fils), celle du « débiteur impitoyable » en Mt
18 :23-35 nous intéresse aujourd’hui. Dans ce récit sont en présence
un roi, grand seigneur, qui ignore le montant de sa fortune et qui veut régler
ses comptes avec ses serviteurs, et un petit bourgeois roturier, pusillanime et
rude, pour qui un sou est un sou.
Le serviteur, personnage central, se trouve devant deux
cas de figure :
1° débiteur à l’endroit du roi d’une somme
considérable, disproportionnée par rapport à ses ressources financières, il est
insolvable. Devant la menace du maître de le vendre, corps et biens, et
d’éteindre ainsi sa dette, le roturier réclame un délai de grâce, une
suspension de l’urgence. Le maître, compatissant, lui accorde, maganime,
la liberté par la remise de la dette.
2° créancier d’une somme dérisoire de cent deniers
devant un de ses compagnons, sans pitié, il choisit la soluton agressive de la
violence. Son compagnon, pris à la gorge, est privé du délai de grâce que
lui-même a obtenu, et de la liberté quil ui donnerait le temps de rembourser.
3° en suite de quoi, le roi, pris de colère, exige que
son débiteur intraitable soit livré immédiatement à la force brutale
jusqu’au remboursement d’une dette qu’il doit, de toute façon
assumer, sans pouvoir la payer jamais.
En fin de compte, le roturier, humainement impitoyable,
est financièrement insolvable et spirituellement impardonnable. En refusant le
règlement à l’amiable de la dette, ce gagne-petit besogneux provoque, en
le marginalisant, l’élimination sociale du débiteur et l’enferme
dans une voie sans issue.
Le projet libérateur de Dieu
Mais ce n’est pas là le comportement du
Dieu de la Bible. Le Père céleste est un Dieu de libéralité infinie (personne
devant lui n’est insolvable). Il est riche en miséricorde (personne
devant lui ne doit être impitoyable). Il est large en pardon (personne devant
lui n’est impardonnable). Et il donne à tous, sans mesure, la capacité de
neutraliser, par le pardon, l’action aliénante du passé, de l’argent
ou de la vengeance. La loi de vie du Royaume des Cieux est donc totalement aux
antipodes des calculs humains habituels. « De la mesure dont vous
aurez mesuré, on mesurera pour vous » (Mt 7 :2). Ainsi Dieu en
remettant la dette qui est pour les juifs une « morsure », rétablit
des relations innovatrices avec les humains et recrée des liens apaisés entre
les hommes eux-mêmes. La lutte sans merci contre l’injustice et
l’intolérance fait vivre le juste en cohérence avec le projet libérateur
de Dieu et démontre que l’humanité ne peut grandir en humanité que dans
la mesure où elle tient sa croissance, sans rancune et sans vengeance, de la
miséricorde de Dieu. Ce Dieu qui ouvre l’avenir de chacun 70 fois 7 fois
par jour.
conclusion : s’il est vrai
qu’il en va du Royaume des Cieux comme d’un roi qui voulait régler
ses comptes, c’est aux disciples qu’il revient de choisir la
manière dont ils veulent que le Père céleste les traite : « Remets
les dettes comme nous les remettons à nos débiteurs » (comparaison), lit-on en Mt
6 :12. Et cette manière dépend de leur attitude envers leurs
semblables : « Remets nos péchés parce que nous remettons à qui
nous doit (raison), lit-on en Lc 11 :4.