N°23
Mai 2001


 

OSEE, prophète de la parole donnée .........................................camille-paul cartucci, metz

Il était une fois un homme du Royaume du Nord qui avait épousé une femme plantureuse, Gomer, dont il eut trois enfants. Gomer qu'il chérissait lui fut infidèle; elle courait après ses amants, les baals, les dieux-maîtres. Baal, c'est la divinité qui meurt et qui renaît avec la nature, qui a le pouvoir de rendre les champs fertiles et les troupeaux féconds. Il dut se séparer de sa femme. Il s'appelait OSEE.

Osée était prophète dans ce même royaume du Nord. Il comprit que l'aventure qu'il vivait ressemblait trait pour trait à l'expérience que fit Jahwé qui, lui aussi, avait épousé une splendide femme juive qu'il appelait son peuple. Il avait conclu avec elle une alliance indéfectible; et cette alliance avait donné à Israël son identité première. Il l'avait comblée de bienfaits comme personne. Tout au long de son errance dans le désert et au moment de la conquête du pays promis, Jahwé avait accompagné, soutenu, nourri son peuple. Il avait tout fait pour le sauver de la captivité et le conduire sain et sauf vers la terre de liberté. Pas une heure ne s'était passée sans que ce Dieu de rédemption ne fût pour son peuple un père et un époux attentionné.

Et pourtant, malgré ces prévenances de tous les instants, Israël a trahi l'alliance en courant après les idoles et en se prostituant dans le culte des Baals. Pour une race d'agriculteurs, ceux-ci semblaient plus efficaces que le Dieu d'Israël pour assurer la fécondité des troupeaux et la fertilité du sol. Le culte syncrétiste des Baals s'accompagnait de rites agraires comme celui de la prostitution sacrée, pratiqués dans les sanctuaires. Et ceux qui auraient dû maintenir le peuple dans la fidélité à l'alliance ont eux aussi failli à leur mission: les religieux n'ont pas donné à leurs fidèles la connaissance de Jahwé; les rois ont mis leur confiance et leur ambition dans leur volonté de puissance et dans des alliances politiques avec les roitelets païens environnants. La rupture était telle que l'idolâtrie se pratiquait partout et que les injustices sociales, leur corrélats, détruisaient tout le tissu social du pays. La situation était dramatique pour la survie du jahwisme et pour celle du peuple élu. Le châtiment divin ne devait plus tarder: Jahwé allait ramener Israël au désert redoutable d'Egypte: là, le peuple, placé hors de ses sécurités habituelles, connaîtra l'épreuve sans nom (Deut 8:15) : il sera réduit en terre desséchée (Os 2:5.11.14). Jahwé ira jusqu'à mobiliser le fléau dévastateur du vent desséchant, du feu, de la guerre (Os 9:11-14; 13:14; 14:1) pour l'anéantir: c'est, en termes figurés, la menace annoncée de l'invasion de l'Assyrie (Os 8:13; 9:3; 11:5-6) et la destruction définitive du royaume d'Israël.

Après quoi, c'est Dieu lui-même qui ramènera son peuple, par un nouvel exode, vers la Terre Promise (Os 11:9) pour conclure avec lui une alliance qui n'aura plus de fin. Après un temps de régénération au désert qui, cette fois, sera une terre de rencontre avec Dieu (Os 2:16-17), l'Israël régénéré retrouvera une terre sainte rénovée. Une prospérité quasi paradisiaque succédera à la période de déserttification du passé: récolte abondante de froment, de vin nouveau et d'huile fraîche (Os 2:24). Et pour la célébration des fiançailles nouvelles avec le peuple, la dot du fiancé sera de cinq cadeaux pour Israël: la justice et le droit, l'amour de tendresse et la miséricorde, la fidélité feront de l'alliance renouvelée une communauté de vie inviolable et loyale, à toujours. Ainsi à travers crises et ruptures, fiançailles et réconciliations, Osée fait passer le message: Dieu aime son peuple comme aucun homme ne pourrait aimer : amour de miséricorde et amour de solidarité, premier pas vers la recherche et la connaissance de Dieu. Alors, désormais, Jahwé pourra dire: "Tu es mon peuple et Israël pourra répondre: "Et toi, tu es mon Dieu" (Os 2:25). Pour toujours.

Le ciel en récompense ?

Quantitativement, notre participation au Royaume de Dieu ne dépend pas de l'accumulation des mérites, des bonnes œuvres ou des exercices de piété. Nous n'avons pas de droits sur Dieu parce que nous avons fait de bonnes et grandes choses. Dieu reste maître des dons qu'Il distribue.

Qualitativement, nous ne sommes pas les artisans de notre récompense. Tout calcul est inutile; ce n'est pas parce que nous travaillons sous le poids du jour que nous passerons "avant" les autres.

Comparativement, nous ne serons pas jugés en fonction des autres, mais nous n'avons pas non plus à nous comparer à eux pour ce qui est du labeur à faire.

Ainsi, notre entrée dans le Royaume ne dépend pas d'un règlement de comptes entre Dieu et nous ou entre nous. Ce n'est pas nous qui avons choisi d'y travailler; c'est Jésus qui nous y a appelés. L'essentiel, ce n'est pas de vouloir se placer en tête ou de vouloir l'emporter sur les autres. Mais c'est bien d'avoir été appelé et d'avoir répondu, chacun à sa place, à son heure et à sa manière, à cet appel.


"Quand tu avances, ne tends pas la main toute droite et n'écarte pas les doigts. Puisque la main droite va accueillir le Roi, fais de ta main gauche un trône pour lui ! Accueille le corps, du Christ dans ta main en forme de coupe et réponds: AMEN" , Cyrille, évêque de Jérusalem (348-349).


"Dieu se trouve dans l'oisiveté" Angelus Silesius.


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