N°10  Janvier 2000

 

 


Une ANNEE MAGIQUE. Mais pour qui ? * camille paul cartucci, metz

Un jour, le professeur Louis Leprince-Ringuet commentait à la télévision, aux alentours de la fête de Noël, l’exploit extraordinaire que venaient d’accomplir les Russes en envoyant un satellite sur Vénus, l’étoile du Berger, gravitant à des millions de kilomètres de la terre. A la fin du débat, ce prince de la culture scientifique ajouta : " La proximité de Noël me fait penser à une autre étoile, celle à la lumière de laquelle les Mages, astrologues écoutés du moment, suivirent la route qui devait les conduire, dans la nuit, vers la lumière même de Dieu ; et nous autres savants, nous avons besoin de ces deux étoiles pour notre équilibre, notre bonheur et notre marche vers l’avenir ".

Dans les civilisations traditionnelles, le passé a pesé souvent très lourd dans les décisions et les mentalités des groupes qui tentaient de justifier leur comportement par l’expérience que d’autres avaient faite avant eux. Aujourd’hui, les gens sont fascinés par le futur, car le futur représente l’inconnu, la nouveauté, le jamais-vu, l’imprévisible; c’est le domaine du rêve, du possible, de l’action, de l’innovation.

Mais chacun sait aussi que bien des rêves humains n’ont jamais débouché que sur la nuit et sur le désespoir. La vie quotidienne aux travaux ennuyeux et faciles n’apporte pas les résultats que l’on escomptait. A chaque instant, les sondages révèlent combien les hommes ont peur du futur, de la guerre, des crises de toutes sortes, du chômage, de la mondialisation, des catastrophes naturelles ou provoquées, des lendemains incertains.

Néanmoins, dans toute nuit, si obscure soit-elle, il y a toujours, quelque part, la lumière d’une étoile qui perce l’obscurité et la transfigure : dans la nuit des Noirs d’Amérique, il y eut la lumière d’un président et d’un pasteur noir et l’espoir de la reconnaissance de l’égalité raciale ; dans la nuit des jeunes travailleurs, il y eut la lumière d’un aumônier qui fonda la JOC et l’espoir d’une plus grande justice pour eux ; dans la nuit de tous les démunis du monde, il y eut la lumière d’un Jean XXIII, d’une mère Térèsa, d’un abbé Pierre, d’un médecin sans frontières et l’espoir d’une dignité humaine enfin reconnue ; dans la nuit d’Abraham, il y eut l’éclat de la foi et l’espoir de la naissance du futur peuple de Dieu; dans la nuit des Mages, il y eut la lumière d’une étoile et l’espoir de trouver, au bout de la route, le prince de toute lumière et de toute paix.

Dans notre monde moderne, une minorité de croyants que Dieu appelle l’Eglise poursuit, contre toute espérance, une route semblable à celle de nos frères aînés dans la foi. Dans cette perspective-là, le Seigneur nous demande de savoir lire, dans les espoirs gigantesques des hommes, les signes de l’avènement d’un monde où la vie l’emportera sur la mort et la liberté sur toute forme d’aliénation.

Nous savons bien que si les bergers n’avaient pas fixé les étoiles, ils n’auraient pas couru à Bethléem ; nous savons encore que si les Mages s’étaient contentés de consulter les horoscopes, ils n’auraient pas risqué leur vie ni leur avenir pour suivre les indications vacillantes d’une étoile. Mais s’ils l’ont fait, c’est qu’ils avaient estimé que l’enjeu en valait le risque, le prix et l’aventure. A l’issue de leur voyage, comblés au-delà de toute espérance, ils se prosternèrent devant cet enfant si longtemps annoncé et déjà menacé par les puissants. Ils pouvaient repartir, à présent, retrouver la grisaille de leur vie quotidienne qu’une étoile, cette nuit-là, avait définitivement transfigurée.

Puisse cette nouvelle année se passer, pour chacun d’entre nous, dans la sérénité et l’espérance. Car l’espérance, c’est comme l’étoile, elle ne brille que dans la nuit.

C’est quand le 21ème siècle ?

2000 est un multiple de 400,de 100 et de 4. C’est donc, en même temps qu’une année millénaire et séculaire, une année bissextile. Certes toutes les années séculaires ne sont pas bissextiles (ainsi les années 1700/1800/1900). Elles le sont lorsque leurs premiers chiffres sont divisibles par 4. Ainsi 1600 fut une année bissextile ; l’année 2400 le sera aussi, si nous arrivons à vivre jusque-là. Ce XXème siècle se terminant le 31 décembre 2000 aura donc enregistré 25 années bissextiles.

En outre, le calendrier chrétien s’étant imposé dans le monde entier a été appliqué dans notre histoire à une époque où le ZERO n’existait pas encore (le zéro n’est apparu qu’au 13ème siècle avec le mathématicien Fibonacci).

Voilà pourquoi tous les siècles de notre calendrier commencent au premier janvier O1 et se terminent au 31 décembre OO. Cuistres ou pas, qu’on le veuille ou non, c’est comme ça.

Donc le XXème siècle se terminera le 31 décembre 2000 et le XXIème siècle ne commencera que le 01 janvier 2001.

Ce jour-là, au petit matin, après une nuit de festivités et une année identique à toutes les autres, tout le monde s’en ira dormir. Et le lendemain, chacun contemplera, étonné, le nouveau monde et le nouveau siècle : ce sera celui de l’an 2000, de l’an 2001, de l’an 2002 ; ce sera celui de la veille.

Rien en effet n’aura changé. Mais on saura un peu mieux, à l’expérience, que la mutation permanente du temps n’est modifiée ni par les années ni par les jours ni par les heures qui passent. C’est en soi-même que le temps fait son œuvre de création et de rénovation et que c’est hors de soi qu’on en mesure la réussite, la nouveauté, la vétusté, la fugacité, l’éternité.

Reste que la très bonne question qui dirimerait toutes les élucubrations quelque peu futiles sur la chronologie de cette fin de siècle serait la suivante : " Quel âge avait Jésus lorsqu’il est né ? "


" On t’a fait connaître, ô homme, ce qui est bien pour ton bonheur, ce que Dieu attend de toi.
Rien d’autre que ceci : accomplir la justice, aimer la bonté et marcher humblement en présence de ton Dieu 
" (Michée 6 :8).

Nous souhaitons à tous les résidants de l’île une heureuse et féconde nouvelle Année !


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