N°9 Décembre 1999

 


Une ANNEE de GRACE * camille paul cartucci, metz

Lorsque Jésus prêcha pour la première fois dans la synagogue de Galilée et qu’il lut le texte suivant d’Esaïe 61 :1s : " L’Esprit du Seigneur est sur moi. Il m’a envoyé porter la bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur délivrance, rendre la vue aux aveugles, donner la liberté aux opprimés, proclamer une année de grâce du Seigneur ", il ajouta : " Aujourd’hui s’accomplit à vos oreilles ce passage des Ecritures " (Lc : 18-19.21). Annoncer aux pauvres la bonne nouvelle, c’était les inciter à ne pas s’installer dans la résignation en attendant les promesses de la vie éternelle. C’était les provoquer à construire eux-mêmes un monde où leurs droits seraient respectés et où ils seraient les sujets de leur propre histoire. C’était leur annoncer que Dieu venait remettre en ordre ce qui s’était construit dans l’anarchie et l’injustice dont découlait leur pauvreté.

Lorsque Jean-Baptiste, emprisonné, lui fit envoyer des messagers pour lui demander : " Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ? ", il fit répondre : " Allez dire à Jean que les aveugles voient, que les sourds entendent, que les lépreux sont guéris et que les pauvres sont évangélisés " (Mt 11 :3-5).

C’était là le signe du revirement total de l’histoire: le Royaume de Dieu se réalise, aujourd’hui, dans l’univers des hommes; un autre monde est en train de naître. C’est un prophète qui s’est levé à Nazareth et qui apparaît en Galilée qui le crie : " Croyez à cette bonne Nouvelle " (Mc 1 :15). Dieu intervient dans le temps et va instaurer, par une transformation en puissance de tout l’ordre des choses, de nouveaux cieux et une nouvelle terre. Ce Royaume dont on trouve 122 fois la mention dans les Evangiles et 90 fois dans la bouche de Jésus, signifiait pour les foules qui écoutaient l’exaucement d’une attente déjà si longue : celle qu’à la fin du monde ancien, toutes les aliénations humaines seraient détruites : le mal, la haine, la faim, la tempête, le péché, la souffrance, la mort. Le Royaume de Dieu serait la manifestation de la souveraineté bienfaisante de Dieu sur ce monde tourmenté, déchiré par le malheur et les forces de violence (on sait aujourd’hui que des 3400 années de l’histoire datée des humains, 3166 ont été des années de guerre. Les 234 années restantes n’ont été que des années de préparation militaire à de nouvelles agressions. Il y a là une aliénation tragique qui traverse l’histoire de l’humanité et qui ne laisse pas d’être désespérante).

Cette utopie qui était l’aspiration profonde vécue dans l’imaginaire collectif du peuple du Premier Testament, Jésus promet que ce ne sera pas une illusion et il en paiera le prix.

L’année sabbatique devait être une année de libération des esclaves et de réconciliation sociale par la remise des dettes. L’année jubilaire devait inaugurer une ère de pardon et de jubilation pour Israël, le peuple de la miséricorde. Avec Jésus s’accomplit une des promesses majeures des temps messianiques (Es 61 :1s). Devant les attentes et les espoirs d’une humanité en quête de paix et de prospérité s’ouvrent toutes grandes les avenues de ses rêves et de son espérance millénaire : c’est " l’année de grâce du Seigneur " (Lc 4 :19),

 


 NOEL, c’est à la fois, pour certains, une fête gastronomique, une fête folklorique (sapin, souliers dans la cheminée, père Noël en barbe de sucre), familiale (nostalgie de l’enfance, réveillon aux huîtres et aux marrons chauds), et, pour quelques-uns, une fête religieuse (naissance de Jésus devenu l’un d’entre nous).

Depuis 18 siècles, on a christianisé une fête païenne, celle du SOLSTICE d’HIVER, qui est la nuit la plus longue de l’année et le jour le plus court.

En même temps, le jour rallonge à nouveau ; la lumière prend le pas sur la ténèbre ; c’est le point de départ et l’annonce lointaine du retour du printemps.

Cette fête du solstice d’hiver était dédiée, à Rome, à la naissance du " SOLEIL INVAINCU ", invincible ou triomphant (le "sol invictus"), soleil qui domine les ténèbres et luit à nouveau de tout son éclat. Elle était consacrée à la naissance de Mithra, la divinité solaire perse vénérée par les légionnaires romains (et au culte de laquelle les " Mages " étaient initiés), ainsi qu’à la personne de l’empereur considéré comme un dieu incarné.

A partir du 4ème siècle :

La fête connut vite un énorme succès populaire. On institua une vigile nocturne, comme à Pâques, avec ses trois messes de la nuit, de l’aurore et du jour.

Aujourd’hui, par un triste retour des choses et du balancier, on a à l’inverse paganisé une fête chrétienne : le petit Jésus en pain d’épices ou le petit pépé Noël roucoulé par Tino Rossi, un corse d’Ajaccio, a remplacé le Christ Jésus de la Nativité. Noël est devenue une très mauvaise nouvelle pour les dindes. Et c’est bien dommage pour tout le monde.

Il reste que, durant cette nuit éblouissante entre toutes, l’Astre levant venu d’en-Haut est apparu à ceux qui se trouvaient dans les ténèbres et l’ombre de la mort, afin de guider leurs pas sur les routes de la paix (Lc 1 :78-79). La naissance de Jésus durant cette nuit-là ouvrait à toute l’humanité un espace transfiguré, à la clarté duquel ont pu marcher, émerveillées, depuis 20 siècles, toutes les Nations de la terre, jusqu’aux portes de l’Eternité.


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