N° 7  Octobre 1999

 

 


L’Année Sabbatique: une année de libération * camille-paul cartucci

Moise avait établi la loi pour un peuple nomade et agropastoral. S’inspirant de la semaine de sept jours se terminant par le repos du sabbat, la législation du Code de l’Alliance instaura, pour le repos de la terre, un cycle de sept années (Ex 23 :10-11) à l’issue duquel il y aurait une année sabbatique qui devait assurer son repos à la terre après six années de culture: champs, vignes et oliveraies seront laissés en jachère durant une année et leur produit spontané sera abandonné aux indigents du peuple et aux bêtes des champs. Comme l’homme et la terre, les animaux domestiques qui sont attelés à la même tâche bénéficieront d’une année bienfaisante de repos. En effet, tout appartenant à Dieu, les moyens de production et les biens de consommation ne devaient pas être accaparés par quelques-uns, mais leur finalité devait périodiquement être remise en question.
En outre, après six ans de service, l’esclave hébreu mâle sera rendu à la liberté en la 7ème année, à moins qu’il ne manifestât le désir de rester pour toujours chez son maître (Ex 21 :2-6), après que le maître, pour symboliser l’attachement de l’esclave à la famille, lui aura percé l’oreille (
l’oreille étant symbole d’obéissance). En effet, parce que tous avaient été libérés par Dieu de la servitude d’Egypte, nul ne pouvait être définitivement réduit en servitude.

Depuis, Israël était passé à une civilisation sédentaire et urbaine. A Samarie, les riches avaient des palais bien construits, aux murs plaqués d’ébène, qui s’élevaient à côté du quartier sous-prolétaire et misérable (Amos 2:6 3:15). Ce changement de civilisation appelait une adaptation et un réajustement de la loi. Le Deutéronome, qui reflète la situation sociale du 8ème siècle, va légiférer pour protéger les faibles, les petits et les laissés-pour-compte.

Son souci fut de pallier les disparités sociales et de lutter contre la paupérisation des pauvres (Dt 15:1-11). Du sens religieux (à savoir le repos de la terre de Dieu dont ce Code par ailleurs ne fait pas mention), on passa au sens social: l’aliénation des biens de famille et le développement du prêt à intérêt avaient pour conséquences l’accroissement du paupérisme et l’asservissement des débiteurs défaillants. Ainsi était détruite l’égalité sociale qui avait existé au temps où la terre avait été distribuée entre les 12 tribus d’Israël lors de l’entrée de Canaan et la relation de fraternité qui devait faire secourir tout israélite dans le besoin.

Le Code du Deutéronome prévoyait donc que chaque septième année serait une année de "remise des dettes" et de tous les gages que le prêteur pouvait exiger de ses débiteurs. Il reprenait en outre la règle de la libération par son maître de l’esclave hébreu. Pour le maître, en effet, ayant été lui-même un ancien esclave affranchi par Jahwé, libérer un serviteur était donc une manière de remercier Dieu d’avoir un jour libérer son peuple de la terre de servitude.

Quant au Lévitique (Lv 25:2-7), il prévoit, reprenant la disposition d’Exode 23, que chaque septième année, la terre aura son repos sabbatique: champs, oliveraies et vignes resteront en jachère et leurs produits serviront à la nourriture de tous (Lv 25 :6-8), assurant que Dieu garantira à la terre sa bénédiction pour la 6ème année, dont les produits permettront de passer l’année de jachère et encore l’année suivante jusqu’au temps de la récolte (Lv 25:18.22).

Il prévoit en outre que, après l’année sabbatique qui vient de se célébrer et après 7 semaines d’années, soit 49 ans, commencerait l’année du JUBILE, annoncée dans tout le pays, le Jour des Expiations, au son retentissant du cor (shofar).


RETOUR