N°5 Mai 1999


Fascinante Sagesse

Le Hibou est un oiseau qui voit comme un chat dans les ténèbres et, consacré à Minerve, il est le symbole de la connaissance et de la sagesse.

Difficile à définir dans l’abstrait, la sagesse est une réalité énigmatique et multiple : elle est à la fois l’intelligence de l’expérience humaine, le sens de l’existence de l’homme juste, l’apprentissage des valeurs, un art du bien-vivre ensemble et du bien-être heureux. Médiatrice, elle définit des rapports entre l’homme et la nature : c’est la sagesse technicienne ; entre l’homme et l’homme : c’est la sagesse politique ; entre l’homme et Dieu, c’est la sagesse théologale.

On peut tracer les lignes d’une échelle des valeurs de la sagesse.

Au premier degré de cette échelle, la sagesse est le bon sens : il existe en effet un fonds commun de sagesse populaire qui s’enrichit de l’apport et de l’expérience anonyme de la vie de tous les jours et dont le savoir-vivre sert de référence et de modèle. Ces vérités de tous les âges (du conseiller expérimenté, du vieillard) et de tous les pays trouvent leur expression dans les proverbes et les dictons populaires : Noël aux tisons, Pâques aux rabannes.

A un second degré, la sagesse technicienne, économique ou politique, est le savoir-faire, une sagesse tirée de l’observation de la nature ou transmise par les expériences pratiques accumulées des générations, comme celle du navigateur, du commerçant avisé, de l’artisan, du forgeron ou de l’orfèvre.

A un troisième degré, la sagesse est une qualité d’esprit : la "Hochmah" est une qualité qui fait de l’homme un expert dans l’art du bien-vivre : elle est clairvoyance, observation des choses, habileté, perspicacité, science pratique,utilitaire et unique fondée sur un savoir d’apprentissage, conduite pratique de la vie au jour le jour.

A un quatrième degré, la sagesse est une éthique, la science du devoir-faire, l’art de se donner des valeurs de référence pour mener une vie personnelle et sociale réfléchie, paisible, harmonieuse et heureuse. Maîtresse de vie, cette sagesse qui met l’homme en sécurité devant la vie et en confiance devant lui-même. Le sage est l’homme qui est devenu vraiment homme.

A un cinquième degré, la sagesse est religieuse et s’identifie à la piété, attitude de l’homme tourné vers Dieu et préoccupé d’accomplir la volonté divine : le sage est celui qui craint et vénère Dieu, l’homme humble qui fait ce qui plaît à Dieu et qui met sa confiance en Lui. (Prov 15 :33).

A un sixième degré, la sagesse est personnifiée : fille de Dieu, elle a sa source en Lui. Reflet de la lumière et de la sagesse divines, médiatrice entre Dieu et les hommes, ceux qui écoutent son instruction auront la vie en plénitude : des hommes accomplis. Cette sagesse trouve sa joie à se donner aux enfants des hommes et elle met ses délices à vivre parmi eux. On va ainsi vers Dieu par le chemin que Dieu a pris pour venir vers nous. Dans cette ligne, la sagesse a pris les rôles de la mère qui protège ses enfants (Si 14 :26), de l’épouse qui nourrit sa maisonnée (Si 15 :2s), de la maîtresse de maison qui invite les sages à son festin (Prov 9 :1-6), de la bien-aimée envoûtante qui veut captiver (Si 14 :22) et qu’on recherche avec avidité. Debout comme un être vivant aux portes de la ville, elle interpelle les hommes de tous rangs ; à la croisée des chemins, elle invite les passants à écouter ses avis, tout comme les colporteurs et les philosophes ambulants les attirent autour d’eux (Prov 1 :20-33). C’est d’elle qu’il s’agit dans le texte de ce jour. La Sagesse y est représentée sous la forme d’une ravissante jeune fille allant au-devant de ceux qui la cherchent. Radieuse, lumineuse, rayonnante comme un astre, son charme est celui des jeunes filles à la poursuite de leur bien-aimé : offerte aux regards et aux désirs, on peut l’admirer. Prévenante, c’est elle qui vient au-devant de celui qui la cherche. Si l’amant se lève aux aurores pour la rencontrer, elle sera au rendez-vous, assise, patiente, attentive, diligente. A un septième degré, la Sagesse est un attribut divin, la personnification de cette force d’organisation qui se battait aux côtés de Dieu (Prov 8 :27-31) aux origines de la création dont elle est la cause exemplaire. Créée avant toute créature, don inspiré, elle est associée à tout ce que Dieu fait dans le monde ; tout au long de l’histoire humaine, Dieu l’a envoyée en mission ici-bas. Résidant familièrement chez les hommes (Prov 8 :3), elle est la providence qui dirige avec clairvoyance l’histoire collective de l’espèce (Sag 10 :1-11 :4) et assure à tout homme qui l’écoute le secret de son propre devenir.

Camille-Paul CARTUCCI.

 


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